Lorsqu'on parle de "Gaea", on pense généralement à cette association d'écologistes activistes qui s'est formée dans les années 2050 afin de révéler au monde l'existence des faës et de le sensibiliser à l'urgence environnementale. Ce que l'on sait nettement moins (et à raison, puisqu'il s'agit d'un secret) c'est que Gaea trouve en réalité ses origines dans l'Antiquité grecque.

La légende raconte qu'un faë aurait rencontré un humain et lui aurait révélé sans retenue sa nature. L'humain, plutôt que de prendre peur, serait immédiatement tombé sous le charme de la créature et lui aurait dès lors consacré une adoration sans borne. Il aurait entraîné avec lui sa famille et quelques autres mortels et avec le temps, leur communauté se serait développée au point de réunir quelques dizaines de personnes. Les cultistes de Gaïa (devenue bien plus tard Gaea) vivaient dans une caverne en compagnie de faës qu'ils traitaient comme des divinités incarnées. Ils n'hésitaient pas à s'adonner à des rituels cruels pour divertir leurs Maîtres. Ils pratiquaient régulièrement, en toute connaissance de cause, des sacrifices humains pour nourrir leurs appétits sanglants. Ils ne fréquentaient pas, ou bien seulement très peu, le reste de l'humanité.

Si ce récit est ponctué d'hypothèses plutôt que de faits avérés, c'est parce qu'aucun faë vivant à ce jour ne semble jamais avoir fricoté avec Gaea à cette époque lointaine. Seuls les Feux Follets avaient alors osé s'aventurer aussi loin dans l'Est de l'Europe. Ces derniers n'ont de cesse d'affirmer qu'ils n'ont rien à voir avec ça et comme ils sont dans l'incapacité de mentir, on est bien obligé de les croire. Certains pensent que les responsables ont emporté le secret dans leur tombe, ce qui avec l'effondrement des arches, à l'origine de milliers de morts, est tout à fait possible. D'autres, plus fantasques, imaginent que Gaea serait le fruit de créatures locales, très similaires aux faës nord-européens et tout en même temps très différentes. Cette idée, bien qu'improbable, expliquerait pourquoi les Éminences Grises seraient aussi longtemps restées complètement ignorantes de ce qui se tramait en Grèce, alors qu'elles envoyaient régulièrement les Feux Follets s'occuper des imprudents aux quatre coins du monde. Cela dit on ne sait pas exactement ce que les Éminences savaient effectivement ou non. On sait juste qu'elles ont choisi de ne pas agir, ce qui ne leur est pas habituel.

Toujours est-il qu'il fallut attendre 1787 pour que les faës qu'on connait entrent accidentellement en contact avec ce qu'il restait de Gaea. L'elfe Velsara était en voyage lorsqu'elle se blessa avec du fer et perdit le contrôle de son illusion. Secourue par un groupe d'humains, elle prit peur à l'idée d'être sanctionnée par les Feux Follets mais fut abasourdie d'apprendre que ces hommes et ces femmes, qui l'accueillirent dans leur maison de campagne pour la soigner, étaient déjà au fait de sa nature, et même de ses vulnérabilités. Cela faisait plus de cent ans qu'ils attendaient la réapparition de leurs maîtres, disparus sans prévenir dans la nature.

Si les Éminences choisirent de ne pas détruire le culte de Gaea et de plutôt profiter de sa servilité, c'est parce que ses membres étaient, tous autant qu'ils étaient, soumis à une étrange malédiction : les parents la transmettaient à leurs enfants. Tout nouvel initié en était mystérieusement atteint dès qu'il avait été intronisé. Un sortilège puissant les empêchait de nuire de la moindre manière aux faës, que ce soit en révélant ce qu'ils savaient à leurs semblables, ou en complotant contre eux. Ancienne magie des mots ? Magie faë oubliée ? Personne ne le sait vraiment, mais elle reste toujours aussi efficace qu'au premier jour.

Alors que les Éminences Grises prévoyaient de révéler l'existence des faës aux humains, ces dernières eurent l'idée de se servir de Gaea comme d'un tremplin, autant que d'une vitrine. Gagner des alliés parmi l'humanité était une étape nécessaire pour pallier au manque d'affinité de leur espèce avec les nouvelles technologies. Le Culte n'était plus aussi isolé qu'à ses débuts. Ses membres étaient intégrés à la société, travaillaient, avaient des amis non impliqués... Ils aidèrent à rallier à la cause faë un bon nombre d'humains qui devinrent rapidement les yeux, les oreilles et la voix de Gaea sur les réseaux sociaux. De plus en plus de faës rejoignaient le mouvement, acteurs des nombreux enregistrements qui pullulèrent sur internet pendant un long moment.

Rapidement, les membres originels de "Gaea" ne furent plus qu'une minorité obscure dont l'existence demeurait inconnue aux nouveaux arrivants. A ce jour, ils persistent dans l'ombre, en marge des activités principales de l'organisation.

On doit l'organisation de la nouvelle version de Gaea aux humains qu'elle accueille plus qu'aux faës qui la dirigent, les créatures du Sidh n'étant que peu friandes des hiérarchisations à outrance, à leur goût inutiles. La structure de Gaea reste par essence très brouillonne au-delà de quelques catégories définies, car il a fallu contenter tout le monde.

On trouve à sa tête un individu unique : la Main de Gaea. Membre du Conseil faë, la main coordine les trois équipes qui sont sous sa supervision, tout autant qu'elle chaperonne ce qu'il reste du Premier Culte. C'est l'elfe Velsara, figure de proue du culte depuis qu'elle l'a redécouvert, qui a été nommée pour tenir ce rôle (personnage prédéfini).

Les équipes ont été nommées par les faës en hommage à la mythologie grecque dont Gaïa/Gaea est issue (... principalement parce que créer des parallèles obscurs les amusent).